On rappelle pour un ensemble de particules, avec positions , vitesses , forces et masses , le principe fondamental de la dynamique :
On a vu dans le chapitre précédent comment résoudre cette équation numériquement, mais pas comment calculer la force qui s’exerce sur chaque particule. À cause de notre utilisation de l’algorithme Velocity-Verlet, la force de chaque particule ne peut dépendre que de la position des autres particules, et non de leur vitesse. Cela peut sembler restrictif, mais on verra que ce n’est pas une limitation importante pour simuler des solides et des fluides. En plus de cette restriction algorithmique, on va imposer que toutes les forces découlant des interactions entre particules dérivent de potentiels, c’est-à-dire qu’il existe une fonction scalaire telle que :
où on note la position de toutes les particules ().
Toute la physique que l’on souhaite intégrer à notre simulation est contenue dans , qui défini l’énergie potentielle totale du système (voir cette revue de potentiels inter-atomiques). La définition de pour un système donné est une procédure délicate qui mène rarement à un résultat unique et en parfaite adéquation avec le système en question. Nous verrons dans ce cours quelles hypothèses sont raisonnables pour certains solides et fluides simples.
On remarque que est une fonction de la position de toutes les particules. Dans le cas général, on peut écrire (Müser, Sukhomlinov, et Pastewka 2023) :
est l’énergie potentielle due à des forces extérieures (par exemple un champ gravitationnel uniforme, un champ magnétique, etc.). définit l’énergie potentielle pour des paires de particules. Par exemple, l’énergie potentielle de gravité entre deux particules peut s’écrire . Le système solaire peut donc être simulé uniquement en définissant l’énergie potentielle pour des paires de particules. Suivant cette logique, définit l’énergie pour un triplet de particules. C’est l’énergie que l’on doit définir pour décrire une molécule comme : l’énergie des atomes d’hydrogène dépend certes de la distance , mais aussi de la position des autres atomes d’hydrogène pour former un tétraèdre à l’équilibre, quand l’énergie potentielle est minimale. Dans ce cours, on se limitera dans un premier temps aux potentiels et .
Ci-dessous quelques exemples de potentiels :
Potentiel pesanteur
Pour le cas d’un champ de gravité uniforme, on peut définir :
Potentiel harmonique
L’énergie potentielle d’une paire de particules reliées par un ressort de rigidité peut s’écrire :
Potentiel de Coulomb
L’énergie d’interaction de deux particules chargées s’écrit comme le potentiel de gravité :
En règle générale, l’énergie potentielle d’interaction d’une paire de particule obéit à deux relations d’invariance :
- L’énergie est invariante par translation : une paire de particule à une distance fixe a la même énergie, peu importe sa position dans l’espace
- L’énergie est invariante par rotation : une paire de particule à une distance fixe a la même énergie, peu importe l’orientation de la paire dans l’espace
Ces deux propriétés se traduisent mathématiquement par le fait que est seulement fonction de la distance entre les particules . Démontrons que l’invariance par translation donne une dépendance en uniquement.
L’invariance par translation veut que pour tout vecteur on ait :
Si l’on calcule la dérivée par rapport à de l’équation ci-dessus, on obtient :
On opère à présent le changement de variable suivant et , et on définit le potentiel tel que :
On peut donc écrire les dérivées partielles suivantes :
et remplacer dans l’Équation 2.1:
Puisque la dérivée de par rapport à est nulle, est donc constante par rapport à et dépend uniquement de . On peut faire une démonstration similaire pour l’invariance par rotation.
Maintenant qu’une expression pour la force et pour l’énergie potentielle a été établie, essayons de calculer la force agissant sur une particule pour des particules indépendantes () et pour l’absence de forces extérieures ().
Forces extérieures
Dans le cas où , la force sur une particule à la position est simple à calculer :
Le seul terme non-nul de la somme est pour , on a donc :
La force sur la particule ne dépend que de , les particules sont donc bien indépendantes.
Calculer la force pour le potentiel électrique
Forces entre particules
On se place dans le cas où, par invariance, est fonction uniquement de la distance entre particules :
Calculons la dérivée par rapport à pour les termes de la double somme :
La dérivée de par rapport à s’exprime sous la forme :
où est le vecteur normalisé. On peut à présent exprimer la force . Pour simplifier les notations, on pose qui est la force qu’exerce la particule sur la particule (par la troisième loi de Newton, on a ) :
Logiquement, on trouve que la force totale sur la particule est la somme des forces pour toutes les paires , mais ce calcul montre la marche à suivre pour l’étape 3 de Velocity-Verlet :
- Pour chaque paire de particules , calculer
- Pour chaque particule, calculer
Puisqu’il faut faire une somme de termes pour chacune des particules, le calcul des forces tel qu’écrit ci-dessus, dit “calcul naïf”, a une complexité algorithmique de , ce qui devient vite coûteux. On verra dans un prochain chapitre un moyen de calculer les forces en opérations.
Le TP 2 est une application de ce calcul pour des chocs entre boules de billard élastiques.
Müser, Martin H., Sergey V. Sukhomlinov, et Lars Pastewka. 2023. « Interatomic Potentials: Achievements and Challenges ». Advances in Physics: X, décembre.